
Métamorphose d’une utopie
Comment penser les configurations identitaires à venir. Profitant du 500e anniversaire. de la » découverte des Amériques » 25 écrivains et chercheurs, invités à un colloque à La Sorbonne nouvelle du 25 mai 1991 essaient de répondre à cette question. Elle demeure plus que jamais brûlante aujourd’hui.
Le multiculturalisme, l’interculture, le métissage, le « salad bowl », la transculture apparaissaient alors comme autant de métamorphoses de l’utopie originelle : celle que les colons européens ont cherché à fonder en la déniant parfois aux peuples autochtones. Ainsi se pose à nouveau, au-delà des inévitables tentations communautaires, le rapport au politique, à la culture et enfin à l’État.

Métamorphose d’une utopie
Un colloque peut facilement donner naissance à des actes, simple juxtaposition de communications, mais très rarement à un livre organisé de manière cohérente avec un fil conducteur. « Métamorphoses d’une utopie » appartient à cette dernière catégorie. L’utopie est celle des colons européens allant fonder outre-Atlantique une nouvelle humanité, en détruisant celle qui s’y trouvait déjà. Puis, au cours des siècles, s’organisèrent les rapports complexes qui vont de la « transculturation » au repli identitaire et ethnique. Le Canada et les Etats-Unis offrent toute la gamme des exemples entre ces figures extrêmes.
Et l’Europe ? Dans son introduction, Ignacio Ramonet, à partir, notamment, du cas du Tanger des années 50 et des multiples situations nées de l’effondrement du communisme, montre la portée universelle des valeurs de la laïcité, qui ont permis, en France, l’intégration de minorités importantes. Il détaille, en même temps, les difficultés auxquelles elles se heurtent lorsque existent des communautés récentes, aux traits culturels affirmés.
Bernard Cassen, Le Monde diplomatique. Août 1992