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Pourquoi l’héritage de César nous concerne , nous Européens.

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Fulvio Caccia
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Au  moment  où les tentations impériales  se font  plus manifestes, il est plus qu’urgent de se  rappeler  la manière  dont  la république romaine a basculé vers l’empire.  A cet égard le docudrama intitulé «  le destin de Rome » de Fabrice Hourier  proposé par Arte nous en donne une belle démonstration. Sa qualité principale c’est la vulgarisation  qui va à l’essentiel  sans négliger les détails.  Et l’un de ces détails c’est justement la langue latine avec laquelle les protagonistes parlent  à leurs troupes  et, par devers eux, à nous,  contemporains.  Mais  ce n’est pas la seule trouvaille  de ce moyen métrage  déjà ancien qui utilise  avec intelligence  les techniques de l’intelligence  artificielle  pour créer l’illusion des masses qui s’affrontent.

Rappelons les faits. En -44,  Jules César  s’accapare de tous les pouvoirs en s’autoproclamant dictateur à vie.  La république et ses  institutions sont menacées. Durant les ides de mars  Brutus et Cassius, le tuent au Sénat pour sauver la République. Mais les amis de César veulent  le venger et s’approprier  de son héritage. Une nouvelle  guerre civile  est imminente.  Le Troisième en vingt ans.

Sur cette période tumultueuse, les lettrés  latins  ont beaucoup glosé offrant un matériel de choix à leurs successeurs. De William Shakespeare à Thornton Wilder en passant par le cinéma de Joseph Mankiewicz, et plus récemment encore de Francis Ford Coppola  sans parler du projet Cléopâtre de Denis Villeneuve,  cet épisode romain n’a  cessé de fasciner les créateurs d’ hier et d’aujourd’hui. Passion,  sexe, pouvoir, trahison, amour, violence, vengeance…. tous les  ressorts  de la tragédie y sont exposés.

Freud commenta longuement le meurtre du père par les fils méprisés pour expliquer le totem et le tabou relié au cycles de la violence. Un René Girard  en a distingua les quatre  étapes essentielles. Désir mimétique, compétition mimétique, rivalité mimétique, conflit mimétique , bouc émissaire.

Par-delà  ces  interprétations  savantes ou artistiques, mon intérêt  n’est pas la légende qu’elles ont tissé mais  son opposé : son détricotage. Pourquoi ? Parce que cela permet de saisir les mécanismes  toujours actuels  de la manipulation du langage qui  en est la condition  fondatrice.   C’est  d’ailleurs en quoi le destin de la  république romaine, nous interpelle, à nous est contemporain  et continue encore aujourd’hui d’aimanter  nos  perceptions et nos actions. Il nous donne à voir  dans son dépouillement élémentaire la manière dont on fait passer des intérêts particuliers pour l’intérêt général. C’est cette hypothèse que j’explore dans les divers articles de ce site.

Car la légende a tendance à voiler le secret de la langue, en permutant le mensonge contre celui désigné comme l’ennemi et futur bouc émissaire.  » Celui qui le dit, c’est celui qui l’est ». Cette vérité que l‘on s’assénait par jeu dans les cours de  récré, montre au passage  la puérilité des abus de pouvoir  et la facilité  de l’oubli de la vérité. Ainsi  lecteur distrait aura tendance à retenir de ce drame la trahison de Brutus : « tu quoque mii fili » alors que le vrai traitre c’est César.

En  revendiquant l’ héritage de César contre  les institutions  républicaines, Marc-Antoine associé à Octavien et Lépide, le second triumvirat,  initiera  une longue et pernicieuse tradition  qui se perpétue encore aujourd’hui.  Elle oppose les partisans de  la république contre les dictateurs et leur intérêt  personnel mais par de la également  de tracer les frontières entre  l’Occident et  l’Orient.    Cette tradition aura pour nom le Saint Empire Romain Germanique  et domine encore notre actualité. Les conflits  en Ukraine et  en Europe de l’est en sont les derniers avatars. Par devers  eux, l’enjeu en effet  est de délimiter les limes de l’Europe avec le reste du continent eurasien :

 S’il est vrai comme nous rappelle Karl Marx  dans Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte (1852) que « la première fois l’Histoire se répète comme tragédie, la seconde fois comme farce » . Que penser de la séquence que nous vivons ?  Faut-il  pleurer ou en rire ?  Les deux mon capitaine . Le candidats  césariens  se bousculent au portillon. Réussiront-ils au vu et au du monde entier  à nous faire avaler leurs couleuvres?  Telle est la question.

Pourquoi l’héritage de César nous concerne , nous Européens.

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