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Les guerres des trois monothéismes et la nouvelle « ligne gothique »

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Fulvio Caccia
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En cette période où le Ramadan est croise les Pâques chrétiennes et celle juive, il est opportun de s’interroger sur les derniers avatars d’une vieille querelle qui oppose les croyants du Dieu unique depuis deux millénaires. Cette querelle s’est à nouveau fixée sur deux points particuliers le long d’une ligne qui sépare depuis longtemps l’Orient de l’Occident : au nord vous aurez reconnu l’Ukraine et au sud, la Palestine. C’est le long de cette ligne que l’immense continent eurasien se détache de son cap occidental. C’est sur cet axe que les civilisations orientales rencontrent et se confrontent avec les tribus autochtones et les transforment. Rien d’étonnant puisque c’est sur cette ligne que passe le commerce des objets, des cultures et des dieux. Pour le meilleur et pour le pire, les monothéismes y sont nés. Califes, papes, ayatollahs, Rois, empereurs n’ont eu depuis cesse de repousser ses limites le plus loin possible dans l’une ou l’autre des points cardinaux : autant de l’est vers l’ouest que du sud vers le nord. Et vice versa. Une bonne partie de l’histoire de l’humanité peut ainsi se comprendre comme le flux et le reflux des civilisations autour de cette frontière. Est-ce d’ailleurs un hasard si dans son septentrion la frontière s’appelle Ukraine au sens propre comme au sens figuré. Quant à son « méridion », la guerre en Palestine où s’opposent frontalement les ultraorthodoxes de l’un et l’autre camp l’exemplifie plus que jamais. Chassez le naturel, c’est-à-dire le religieux, il revient au galop dans notre soi-disante modernité laïque.

Ces deux guerres sont en effet deux manifestations majeures de la Révélation en cours, c’est-à-dire de l’Apocalypse. Il est pour le moins paradoxal de parler d’Apocalypse dans un monde en voie de sécularisation, d’uniformisation urbaine où la Loi du marché a apparemment du moins supplanté la loi du Dieu unique, arasant les spécificités de toutes les nations selon un unique modèle de consumérisme. À cet égard, les images des pompiers fouillant les décombres du « Crocus City Hall » (le nom anglais dit déjà tout) ont d’emblée ému tous les citadins de la planète. Et pour cause c’est leur mode de vie qualifié à tort « d’Occidental » qui est encore attaqué. Faut-il s’en étonner ? Il y a belle lurette que nous sommes entrés dans la « cité planétaire » ; le village global de la consommation et de la communication. « Citadins de tous les pays désoccidentalisez — vous » ripostent, kalachnikov à la main les extrémistes religieux de tous crins. Mais pourquoi ? Pour retourner vers un dieu intransigeant, imposé par un patriarcat rétrograde et despotique ? Ses adeptes entendent redéfinir la nouvelle ligne de partage entre orient et Occident en reprenant de manière répressive l’affrontement de jadis entre anciens et modernes. La parodie ici devient tragédie.

Si l’affrontement religieux se cristallise au sud entre les deux monothéismes : le Hamas et les ultras religieux juifs, au nord elle surgit des décombres de l’idéologie communiste faisant apparaître la vieille rivalité intra-chrétienne entre les courants extrêmes de l’orthodoxie orientalisante et le christianisme protestant qui naguère encadrait le libéralisme économique. Aujourd’hui la financiarisation ultralibérale fonctionne en roue libre sans même plus rattachement à l’étalon or comme naguère. ( La décision de Richard Nixon de rompre la convertibilité du dollar américain en or à la fin des années 70 a été un tournant à cet égard.)

Aujourd’hui alors que la Russie s’est engagée elle aussi dans l’économie de marché, la rivalité mimétique s’est déplacée de l’idéologie vers le marché et ses zones d’influences.

Qui déterminera la frontière de ladite modernité et qui en aura le magistère ? C’est tout l’enjeu de ces conflits multidimensionnels où le libéralisme économique qui s’est émancipe du modèle religieux qui l’avait jusqu’ici contenu, ne peut plus promettre le bien-être des huit milliards de terriens comme les religions, le salut de l’au-delà.

*

Au cours de la Renaissance, ce terme désignait la frontière du monde dit civilisé et soumis au régime de l’imprimé et ses polices de caractères : le gothique.  Durant la Seconde Guerre, la ligne de la défense allemande en Italie s’appelait « la ligne gothique ». Elle coupait la Péninsule en deux. Elle fut  percée par les Alliés qui montaient au sud.   A la fin du XXe siècle, la guerre dans les Balkans a déplacé la ligne vers l’Est .  Ce qui a inspiré mon premier roman dont vous trouverez ici la couverture. Aujourd’hui la ligne  gothique se révèle  à nouveau maintenant dans toute sa longueur,  c’est-à-dire  son origine.

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